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La tonte a la machette

Mardi 13 Fevrier, Nikaura

Notre chambre

La nuit aurait pu etre tranquille dans notre petite cabane de bois au milieu de nulle part si nous n’avions pas ete reveilles en pleine nuit par des meuglements de vaches. A moitie endormie, je n’y prete pas attention, me disant qu’il doit s’agir des vaches dans le champ un peu plus loin. Mais les meuglements se font plus nombreux accompagnes de bruits d’herbe froissee et de va et vient. Ce n’est pas tres agreable, j’ai vraiment l’impression qu’une vache est en train de brouter juste de l’autre cote de la maigre cloison de natte tressee qui nous separe de l’exterieur. Ce n’est pas tres logique car notre terrain est cloture et je ne vois pas vraiment ce qu’un ruminant ferait la. Thibaut est apparemment plus reveille que moi puisque le voici debout, pret a sortir pour en savoir plus sur l’intrus. Une fois dehors, il decouvre que ce n’est pas une vache mais tout un troupeau qui est en train de devorer allegrement notre champ, y compris les fleurs servant de plate bande. Nous sommes sortis hier soir tard pour tenter d’apercevoir le rougeoiement des volcans qui nous entourent et il semblerait que nous ayons mal referme la porte. Heureusement Thibaut joue les justiciers, defendant notre logement et ses fleurs contre les envahisseurs et entreprend de chasser le troupeau. J’entends des cris et autres "pschht" apparemment efficaces puisqu’ils sont suivis d’un bruit de sabots. Cet interlude sportif termine, nous nous rendormons en paix jusqu’au petit matin ou la lumiere du soleil nous reveille.

Il n’est que 8h et nous venons de sortir du lit pour nous habiller quand soudain on frappe a notre porte. C’est notre logeuse qui vient nous avertir que le petit dejeuner est servi ! Heureusement que nous etions matinaux, nous nous amusons a imaginer la tete de personnes venues ici pour se reposer qui seraient ainsi reveillees manu militari alors qu’elles avaient prevu une grasse matinee. Cela nous rappelle les histoires racontees par Rob sur la difficulte a developper le tourisme dans les villages du Vanuatu. Il a anime plusieurs seminaires sur le tourisme et les attentes des etrangers pour aider les ni-vanuatus a s’organiser et nous a raconte que ces derniers n’avaient aucune idee de ce qu’attendaient les occidentaux. Pour eux, une chambre d’hotel consiste en une simple piece ou dormir, sur le modele de nos cases, et il lui a fallu leur expliquer que les touristes seraient heureux d’avoir un lit, une douche et des toilettes et autres agrements de la vie moderne ! Le plus ironique est que pendant le dernier seminaire qu’il a anime, il etait loge par les habitants dans une piece au sol en beton sans aucun mobilier, pas meme un matelas. Avec un peu de chance, si ces cours ont porte leurs fruits, il aura peut etre droit a un lit la prochaine fois !

Pendant notre petit dejeuner, la responsable des bungalows nous previent de "ne pas avoir peur, les villageois voisins vont venir couper l’herbe et entretenir le jardin pour qu’il soit plus agreable". La formule nous fait sourire car nous ne pensons pas que malgre leur carrure souvent impressionnante quelques ni-vanuatus occupes a tondre la pelouse puissent nous terroriser. Nous partons a la plage voir si les deux volcans des iles voisines ont bien voulu sortir des nuages ou ils etaient caches hier. Nous contemplons le superbe spectacle de la baie sur laquelle se detache le sommet du volcan parfaitement conique de la petite ile de Lopevi, tandis que celui d’Ambrym est partiellement dans les nuages. Quand nous revenons, nous comprenons pourquoi il ne fallait pas avoir peur. Ce ne sont pas deux ou trois personnes qui sont venues s’occuper du jardin mais le village au grand complet. Une bonne trentane de personnes sont eparpillees sur le terrain de l’hotel tandis que d’autres arrivent encore, remorquant par la main les jeunes enfants desireux de voir en vrai des etrangers. Apparemment nous sommes l’attraction, heureusement les ni-vanuatus sont d’un naturel plutot discret et a part quelques sourires, bonjours et regards a la sauvette, personne ne nous devisage. Le travail bat son plein et bizarrement ce sont surtout les femmes, notamment les plus agees, qui sont actives. Le terrain est quadrille par une flopee d’habitants (ou plutot habitantes) armees de machettes qui coupent l’herbe a grands gestes. D’autres s’occupent de la ramasser, de remettre en place les pierres des plates bandes et de transporter les dechets vegetaux dans de grands paniers en feuilles de bananier tressees. Le spectacle est plutot impressionnant, surtout a la vision de ces dizaines de machettes en action et nous contemplons d’un oeil cette activite effrenee. En tous cas, c’est plutot efficace car a midi tout est termine et la tonte du jardin est digne d’une pelouse anglaise, plus une mauvase herbe ne traine. Le petit abri de bois construit sur le terrain est lui aussi tout propre, la table couverte d’une nappe et agrementee de fleurs fraiches. Un dejeuner maison de 3 ou 4 plats typiques (poulet en sauce, chaussons frits aux oignons, legumes au lait de coco) nous attend deja et nous avons vraiment l’impression d’etre trop gates. Pour un prix derisoire, nous sommes traites comme des rois et les habitants au grand complet se donnent beaucoup de mal alors que nous n’allons finalement rester que deux nuits. Nous les remercions du mieux que nous pouvons par de grands sourires et apprecions d’autant mieux cet endroit tellement different du reste du monde.

L’apres midi passe vite dans notre petit jardin ou le calme est revenu une fois tous les habitants partis. Nous profitons de la plage avec toujours de superbes coraux et de beaux poissons sous l’eau, des conditions ideales pour le snorkelling. A l’abri du soleil, nous lisons et ecrivons et je prends enfin le temps de potasser le guide de Nouvelle Zelande pour definir notre futur itineraire. Nous nous habituons au rythme local, bien different de celui des citadins. Puisque le soleil se couche vers 18h, le diner est servi a 18h30, a la lumiere des lampes a petrole. Nos hotesses nous abandonnent ensuite et, apres avoir lu un peu a la maigre lueur de notre lampe, nous sommes, fait exceptionnel, couches a l’heure indue de 21h30 ! Nous ne doutons pas que demain nous serons de nouveau reveilles tot pour le petit dejeuner, autant commencer la nuit de bonne heure.

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